Vous connaissez certainement les earthship, ces maisons faites à partir de matériaux recyclés, dont notamment murs réalisés avec des pneus. Une réutilisation qui nous interrogeait quand à son impact environnemental*. Une étude vient contrecarrer nos doutes …
Le recyclage des pneus dans les murs
Une nouvelle étude de l’Université d’Australie du Sud a testé et vérifié l’intégrité structurelle des murs construits à partir de pneus remplis de terre, les résultats offrant potentiellement de nouvelles opportunités pour la réutilisation des pneus en fin de vie dans l’industrie de la construction.
Les déchets de pneus représentent un défi majeur en matière de durabilité à l’échelle mondiale, l’Australie générant à elle seule en moyenne 55 millions (450 000 tonnes) de pneus en fin de vie chaque année ; en France, c’est 577 000 tonnes environ de pneumatiques (soit près de 59 millions de pneumatiques).
Alors qu’on réalise des murs de pneus remplis de terre dans des constructions de niche (inspirées par le concept du earthship de Michael Reynolds) depuis des décennies, il n’y avait auparavant aucune donnée empirique solide disponible pour soutenir leur utilisation. Un fait qui a limité leur adoption plus large par les architectes et les ingénieurs.
Un étude valide l’utilisation des pneus en construction
Soutenue par Tire Stewardship Australia, une équipe UniSA composée de Yachong Xu, Martin Freney, Reza Hassanli, Yan Zhuge, Mizanur Rahman et Rajibul Karim, a rigoureusement évalué l’intégrité structurelle d’une paroi de pneu d’essai pour examiner comment la structure fonctionnait sous divers facteurs de stress.
Selon le Dr Martin Freney, le mur s’est avéré aussi structurellement solide que les murs conventionnels utilisés dans les applications résidentielles.
« Le mur que nous avons testé était le premier du genre à être testé scientifiquement de cette manière, et toutes les données indiquent que les murs de pneus peuvent être des structures extrêmement solides et sûres« , déclare le Dr Freney.
Alors que cette intégrité structurelle a été observée pendant de nombreuses années dans des applications telles que les murs de soutènement protégées par la terre dans les maisons Earthship, le manque de données à l’appui a empêché une adoption plus large des murs de pneus par les ingénieurs et les architectes. Cette étude va changer cela et élargir la gamme de projets dans lesquels ces murs sont utilisés.
En considérant les utilisations élargies des murs de pneus, le Dr Freney suggère que plusieurs caractéristiques uniques des structures peuvent offrir des avantages par rapport à certaines approches de construction traditionnelles, en particulier pour les murs de soutènement.
Non seulement les murs de pneus sont aussi solides structurellement que les murs de soutènement en béton ou en bois, mais ils sont également extrêmement résistants.
« Contrairement à un mur en béton, nous avons constaté que ces murs ont la capacité de » rebondir « après un impact, comme un tremblement de terre. » explique le Dr Freney.
Une porte ouverte à de nombreuses expérimentations
Et si un matériau de drainage tel que des gravats de béton recyclés ou des briques concassées est utilisé pour remplir les pneus, ils offrent également un excellent drainage. Ce qui peut se révéler une éventualité intéressante pour de nombreux projets de murs de soutènement. De plus, l’utilisation de matériaux de remblai recyclés réduit l’impact environnemental du mur.
Alors que l’étude n’a testé qu’un seul mur du monde réel dans le cadre du projet, le candidat au doctorat UniSA Yachong Xu a développé des modèles logiciels qui permettent d’extrapoler les données obtenues à d’autres conceptions, rendant les résultats applicables à un large éventail de scénarios et de parties prenantes.
« Nous croyons vraiment que cette recherche fournit une base de preuves solide pour l’utilisation élargie des murs de pneus dans le logement et d’autres applications, et la prochaine étape sera de s’engager avec un partenaire industriel pour développer une gamme d’applications réelles pour les murs de pneus« , conclut le Dr Freney.
Voir l’étude complète sur les pneus dans la construction
* [Edit du 05/09/2022] Suite à un commentaire de Long Nguyen-Thanh sur le pneusol réalisé entre 1996 et 2004.
(source)
Bonjour.
Article très intéressant qui fait avancer le réemploi dans le bâtiment.
Mais, je me pose quand même la question des effets sur le long terme par rapport à la dégradation des pneus ? Y a-t-il des éléments sur ce point ?
Merci pour votre travail et tous vos articles en tout cas.
Bonjour Thomas,
Merci pour ce commentaire.
Il y a quelques précisions dans l’étude ajouté en [Edit] en fin d’article.
Ok pour la caractérisation structurelle, chose dont on avait déjà des élements solides par le passé.
En revanche qu’en est il de la pollution moléculaire de la réutilisation de pneu ?
Quand on sait aujourd’hui que l’eau en bouteille est polluée notamment par du polypropylène, du nylon et du polytéréphtalate d’éthylène (PET) alors que les contenants sont en plastique « alimentaire », j’ai du mal à imaginé que l’eau de ruissèlement en contact avec ces pneus ne pollue pas le sol à proximité…
Avez vous des infos sur cette problématique ?
merci
@Fred. Il me semble que vous trouverez des éléments de réponse dans l’étude en [Edit] en fin d’article.
Si j’ai bien compris, la dégradation sous terre ou sous béton est très lente. Il ne faut pas de contact aux UV.
Mais il est vrai qu’il serait bien plus simple de privilégier la terre (en pisé par exemple) que d’enterrer ces pneus !