Algue, cèdre ou cuir : 3 matériaux biosourcés innovants pour le bâtiment

Dans le bâtiment, on n’arrête pas d’innover pour nous proposer des produits à la pointe de l’écologie. Que ce soit pour nous débarrasser des algues invasives des Antilles, revaloriser les écorces de cèdres au Québec, ou pour recycler les déchets de cuir, les idées ne manquent pas. Seront-ils les produits de demain ? On vous détaille cela dans cet article …

La sargasse transformée en bloc d’algue

Les algues ont des propriétés qui pourraient être exploitées dans la construction, notamment sa capacité à absorber le CO2 de l’air et sa résistance aux intempéries. C’est ce que Nicolas Vernoux-Thélot (agence In Situ Architecture) a découvert en 2018 (1) après avoir lancé un projet de recherche sur les sargasses qui recouvrent les côtes antillaises. Soucieux de trouver une solution pour la valorisation de ces algues invasives après un voyage aux Antilles, cet architecte s’est lancé le défi d’un programme de recherche en partenariat avec le Centre d’études et d’expertise sur les risques, l’environnement, la mobilité et l’aménagement (Cerema) et les sociétés Nobatek/Inef4 et Tox Sea In.

Tests de brique de terre d'algues

 

L’algue normande présente une petite racine et une grande hampe, ce qui lui permet de s’accrocher facilement aux rochers. À l’inverse, sa cousine germaine des Antilles est moins longue et elle ne fait que flotter. En fonction de l’utilisation de l’une ou de l’autre, les propriétés fibreuses ne seront pas identiques », précise Philippe Solignac, architecte qui a coordonné le projet au sein du Cerema.

 

Or, il s’avère qu’après plusieurs tests, les propriétés thermiques d’un mélange terre et fibres présente un coefficient lambda similaire à d’autres matériaux biosourcés de 0,1. En faisant sécher les algues 48H, elles sont débarrassées de leur souffre, limitant ainsi sa décomposition. Ainsi, le consortium envisage plusieurs gammes de matériaux : briques de remplissage, hourdis pour les poutres et les planchers, panneaux isolants…

Cependant, d’autres défis sont associés à l’utilisation des algues dans la construction, tels que les coûts de production et les considérations réglementaires. Le projet de recherche prometteur, financé à hauteur de 60 % par l’Ademe, doit s’achever d’ici à la fin 2023, pour en explorer davantage.

Un panneau isolant à base d’écorce de cèdre

 Panneau isolant de cèdre - Serex

L’écorce de cèdre est une ressource renouvelable et locale qui est souvent considérée comme un déchet forestier. (2)

 

Tout est parti d’une scierie du Bas-Saint-Laurent, Multicèdre, qui avait accumulé plusieurs milliers de tonnes d’écorce de cèdre», raconte Patrick Dallain, directeur général du SEREX.

 

L’écorce de cèdre présente l’intérêt, comme tout bois, de stocker le CO2 pendant 60 à 80 ans. La scierie a alors fait appel au CTTT (Centre collégial de transfert de technologie) pour trouver des solutions afin d’écouler ce stock d’écorce.

 

Le cèdre a des propriétés très intéressantes de par son écorce fibreuse. Le défi a été de trouver comment préparer cette écorce, la traiter et en extraire les fibres pour obtenir un produit en vrac, explique Patrick Dallain. Après le séchage, on a mélangé ces fibres à une colle, avant de les chauffer et de les comprimer pour en faire un matelas qui ait la bonne densité et la bonne épaisseur pour servir d’isolant. »

 

Après de nombreux tests menés sur des échantillons en laboratoire à diverses échelles, le produit final semble très prometteur, présentant des performances thermiques comparables à celles des isolants traditionnels, avec de meilleures qualités acoustiques.

Si le produit contribue à la réduction des déchets forestiers, le passage à la commercialisation devra passer encore quelques étapes.

 

Il va falloir améliorer le procédé industriel, étudier la rentabilité, faire des études de marché, obtenir une homologation », énumère le gestionnaire, qui espère néanmoins que les négoces pourront proposer ce produit d’ici quelques années.

 

Décorer et isoler avec les déchets du cuir

Panneau Poreva réalisé à partir de cuir recyclé - Recycuir

Aujourd’hui en France, le gisement de chutes de cuir industrielles est considérable. Ce sont plus de 10 000 tonnes de matière noble qui sont inutilisées, non valorisées et enfouies chaque année.

En parallèle de leurs études d’ingénieur Valentin LIGNER et Florian AMIAND (3) ont eu la brillante idée de se lancer dans la R&D autour ce cette matière actuellement mise à la benne : les déchets de cuir !

Après 2 ans de recherche, ils sont arrivés à la création de carreaux souples de chutes de cuir agglomérées, aux nombreux débouchés possibles.

Ils ont créé l’entreprise Recycuir qui collecte des déchets de cuir auprès des industries manufacturières de cuir, telles que les fabricants de chaussures, de maroquinerie et de meubles, et à les transformer en un matériau appelé « Poreva« . Ce matériau est un cuir régénéré, qui a été traité pour enlever les imperfections et pour obtenir une texture uniforme.

Poreva est utilisé pour fabriquer une gamme de produits, tels que des finitions décoratives pour revêtements de sol ou de mur (acoustiques). Le matériau est également utilisé en solution d’isolation thermique.

Le processus de production de Poreva est conçu pour minimiser l’impact environnemental, en réduisant la consommation d’eau, d’énergie et de produits chimiques. De plus, le processus de production est certifié ISO 9001, ISO 14001 et Oeko-Tex Standard 100, ce qui garantit la qualité et la sécurité du produit final.

Une usine de production vient de démarrer en Vendée avec pour objectif pour Recycuir de contribuer à la réduction des déchets de cuir dans l’industrie manufacturière !

Sources et Crédits Photos :

(1) CTB

(2) Québec Science

(3) Recycuir

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Pascal Faucompré
Editeur et Rédacteur en chef de Build Green, le média participatif sur l'habitat écologique et pertinent. Passionné par le sujet de l’éco-construction depuis 2010. Également animateur de nombreux réseaux sociaux depuis 2011 et d'une revue de web sur : Scoop.it

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