Achat d’un habitat léger : quelles sont les garanties ?

Si suite à l’achat d’un habitat léger son propriétaire constate l’apparition d’un défaut, quelles sont les garanties dont il bénéficie pour pouvoir se retourner contre le vendeur ? Dans cette partie nous allons explorer les différentes options existantes : les garanties du droit de la construction, la garantie des vices cachés et la garantie légale de conformité.

1° Les garanties du droit de la construction

La loi Spinetta du 4 janvier 1978 a instauré un régime de responsabilité et d’assurances obligatoire et s’appliquant spécifiquement aux professionnels de la construction. Ce régime comprend trois garanties : la garantie de parfait achèvement, la garantie biennale et la garantie décennale, qui sont inscrites aux articles 1792, 1792-2, 1792-3 et 1792-6 du code civil. Ces garanties permettent de couvrir les dommages apparaissant sur un ouvrage réalisé par un professionnel de la construction, suite à la réception des travaux, et bénéficie au propriétaire de l’ouvrage (quel que soit son statut).

Mais qu’entend-t-on exactement par le terme “ouvrage” ?

Selon le Vocabulaire juridique édité par l’association Henri Capitant, il s’agit d’«un terme générique englobant non seulement les bâtiments mais tous les édifices et plus généralement toute espèce de construction, tout élément concourant à la constitution d’un édifice par opposition aux éléments d’équipement”. 

Un ouvrage est donc un bien immobilier. Or selon l’article 528 du code civil “sont meubles par leur nature les biens qui peuvent se transporter d’un lieu à un autre. Tous les habitats légers déplaçables (yourtes, tipis, caravanes, mobil-homes…) sont donc des biens meubles et ne rentrent donc pas dans le champ d’application des garanties du droit de la construction. En revanche les habitats légers non déplaçables (kerterres, paillourtes…) rentrent dans leur champ d’application.

Pour donner un exemple de jurisprudence en ce sens, dans une affaire où l’acheteur d’une maison mobile réalisait un recours en garantie décennale contre le vendeur de celle-ci, la Cour de cassation lui a refusé l’exercice de ce recours, considérant que la maison mobile était un bien meuble car livrée par camion, simplement posée sans travaux ni fondations et qu’il n’y avait donc pas eu construction d’un ouvrage immobilier (arrêt de la 3eme chambre civile de la Cour de cassation du 28 avril 1993, n° 91-14215).

Vigilance toutefois : si jamais le vendeur d’un habitat réalise des travaux ancrant l’habitat au site et ne le rendant plus transportable (comme la réalisation d’une dalle ou de fondations sur lesquelles est ancré l’habitat ou la connexion de l’habitat aux réseaux d’eau, électricité et assainissement) il peut se voir qualifié de constructeur et être ainsi redevable des garanties décennale, biennale et de parfait achèvement. Et ce même s’il n’a souscrit pour cette construction ni assurance responsabilité civile décennale ni assurance de dommages-ouvrage. Or la souscription de ces assurances est obligatoire et l’absence d’assurance est sanctionnée par des poursuites pénales : selon l’article L. 243-3 du Code des assurances, « quiconque contrevient aux dispositions des articles L. 241-1 à L. 242-1 du présent Code sera puni d’un emprisonnement de six mois et d’une amende de 75 000 euros ou de l’une de ces deux peines seulement ».

2° La garantie des vices cachés

La garantie des vices cachés protège l’acheteur d’un bien (meuble ou immeuble) contre les défauts dissimulés ou non apparents lors de l’achat et se révélant après l’achat, que l’on appelle dans le jargon juridique des vices cachés. Elle est encadrée par les articles 1641 à 1649 du code civil et s’applique quel que soit le statut du vendeur et de l’acheteur (professionnel ou non professionnel, personne publique ou privée, etc).

Pour pouvoir être couvert par cette garantie, un vice apparaissant sur un bien :

  • Soit doit rendre ce bien impropre à sa destination (exemple : fissuration de la charpente rendant une tiny house trop dangereuse pour être habitée)
  • Soit doit être d’une telle importance que s’il en avait eu connaissance l’acheteur aurait renoncé à conclure l’achat du bien ou n’aurait acheté le bien qu’à un prix inférieur

Par ailleurs ce vice :

  • Devait déjà être présent, même en germe, lors de l’achat du bien
  • Ne devait pas être apparent au jour de l’achat du bien

Cas particulier : la garantie des vices cachés ne joue pas pour les biens vendus par autorité de justice (vente aux enchères dans le cadre d’une liquidation judiciaire par exemple).

La mise en oeuvre de la garantie des vices cachés par l’acheteur doit avoir lieu en respectant deux délais :

  • Un délai maximum de 2 ans après la date à laquelle il a connu (ou aurait dû connaître ) l’existence du vice (article 1648 du code civil)
  • Un délai maximum de 5 ans à compter de la date d’achat du bien (article 2224 du code civil et article L 110-4 du code de commerce, fixant le délai de prescription des actions personnelles ou mobilières ainsi que celui des obligations entre commerçants ou entre commerçants et non-commerçants).

La procédure

Etape 1 : pour pouvoir faire appel à cette garantie des vices cachés, l’acheteur d’un bien immobilier doit prouver l’existence d’un vice, le fait qu’il était présent avant la conclusion de la vente du bien et le fait qu’il était caché lors de cette conclusion (la garantie ne couvre en effet pas les vices qui pouvaient facilement être constatés lors de l’achat du bien).

Pour ceci il peut rassembler toutes preuves utiles, un bon moyen étant la réalisation d’une expertise – la liste des experts agréés est disponible au niveau de chaque tribunal.

Etape 2 : l’acheteur doit mettre en demeure le vendeur, en application de la garantie des vices cachés :

  • soit de se faire rendre une partie du prix, ce qui correspond souvent en pratique au montant des travaux nécessaires pour réparer le bien, ce qu’on appelle l’action estimatoire
  • soit de se faire restituer la totalité du prix et les frais occasionnés par la vente, contre la restitution du bien au vendeur, ce qu’on appelle l’action rédhibitoire

De plus, si le vendeur était de mauvaise foi, c’est à dire qu’il avait connaissance du vice au jour de la vente du bien, il doit également des dommages et intérêts à l’acheteur – leur montant doit théoriquement permettre de réparer l’ensemble du préjudice causé par le vice caché. La mauvaise foi est présumée si le vendeur est un professionnel du type de bien vendu (l’acheteur n’a donc pas à la prouver), en revanche si le vendeur n’est pas un professionnel du type de bien vendu il est présumé de bonne foi et la preuve de sa mauvaise foi est à apporter par l’acheteur.

Cette mise en demeure doit être communiquée par écrit soit par une lettre recommandée avec demande d’avis de réception, soit par une signification par huissier de justice soit par recommandé électronique soit par remise en main propre contre émargement.

Etape 3 : 

  • Soit acheteur et vendeur négocient et trouvent une solution amiable au litige, soit directement soit par l’intermédiaire d’un médiateur ou d’un conciliateur de justice
  • En l’absence d’effet de la mise en demeure, en cas d’impasse dans la négociation ou encore d’échec dans l’application de la négociation, l’acheteur peut saisir le tribunal pour demander l’application de l’une des deux options vues à l’étape 2

La clause d’exclusion de garantie des vices cachés

Un contrat de vente sur un bien meuble ou immeuble peut contenir une clause d’exclusion de garantie des vices cachés, selon laquelle l’acquéreur renonce à toute action ultérieure concernant les vices cachés pouvant apparaître au niveau du bien vendu.

La clause d’exclusion ne peut pas jouer si le vendeur est de mauvaise foi, c’est à dire qu’avait connaissance du vice et l’a dissimulé à l’acquéreur lors de vente du bien. Si tel est le cas, l’acheteur doit le prouver, ce qui n’est pas évident en pratique.

Par ailleurs une distinction importante est à faire selon que le vendeur est ou non un professionnel :

  • Si le vendeur n’est pas un professionnel du type de bien vendu (par exemple en cas de vente d’un immeuble il n’est pas un professionnel de l’immobilier ou de la construction) la clause d’exclusion peut bien jouer (à moins qu’il soit de mauvaise foi, comme nous venons de le voir)
  • Si le vendeur est un professionnel du type de bien vendu et que l’acheteur est un non professionnel ou un professionnel d’une autre spécialité, la clause d’exclusion ne peut pas s’appliquer (elle est par ailleurs une clause abusive si l’acheteur est un consommateur, selon l’article R 212-1 6° du code de la consommation). En revanche, la clause d’exclusion est bien applicable lorsque vendeur et acheteur sont tous deux des professionnels du type de bien vendu (Cass, 3e civ., 30 juin 2016, n° 14-28.839).

3° La garantie légale de conformité

La garantie légale de conformité est la garantie à laquelle un consommateur peut faire appel si un produit qu’il a acheté auprès d’un professionnel se révèle défaillant. Dès lors qu’il est établi que le produit est défaillant, le consommateur n’a pas à prouver la faute du vendeur, qui est présumé responsable. Elle s’applique dans tout contrat conclu entre un professionnel et un consommateur, par contre elle ne s’applique pas dans les contrats conclus entre deux professionnels ou entre deux consommateurs.

Cette garantie peut être mise en oeuvre lorsque l’on se trouve dans au moins un des cas suivants :

  • Le bien ne correspond pas à la description donnée par le vendeur ou ne présente pas les qualités annoncées par le vendeur
  • Le bien ne peut pas servir pour l’usage spécifique pour lequel vous l’avez acheté, contrairement à ce qu’a affirmé le vendeur
  • L’installation du bien n’a pas été réalisée correctement par le vendeur
  • Vous n’avez pas pu installer correctement le bien parce que la notice ou manuel d’utilisation était incompréhensible ou incomplet
  • Le bien présente un défaut de fabrication
  • Le bien n’assure pas les fonctions habituellement associées à un bien de ce type

Cette garantie couvre :

  • Les biens meubles corporels (meuble, électroménager, installation photovoltaïque, outil…), qu’ils soient neufs ou d’occasion
  • Les biens réalisés sur commande (réalisation de fenêtres sur mesure…)
  • Le gaz et l’eau lorsque ceux-ci sont achetés dans des quantités déterminées (citernes, bouteilles…)

Concernant les habitats légers, cette garantie légale de conformité :

  • S’applique pour les habitats légers déplaçables, rentrant dans la catégorie juridique des biens meubles
  • S’applique pour les éléments d’un habitat léger réalisés sur mesure (fenêtres, châssis…)
  • En revanche, elle ne s’applique pas pour les habitats légers non déplaçables, ne rentrant pas dans la catégorie juridique des biens meubles

Dans le contrat de vente du produit, les conditions générales de vente (CGV) doivent préciser l’existence de cette garantie, son contenu et sa procédure de mise en œuvre.

L’action en garantie de conformité, prévue par les articles L.217-1 et suivants du code de la consommation, peut être engagée par le consommateur :

  • Dans les 2 ans à compter de la délivrance du bien lorsque celui-ci a été acheté neuf
  • Dans les 6 mois à compter de la délivrance du bien lorsque celui-ci a été acheté d’occasion

Le consommateur n’a pas à apporter la preuve de la cause de la défaillance ou de la date d’apparition de celle-ci, c’est au vendeur (s’il conteste la mise en œuvre de la garantie) d’en apporter la preuve. En pratique l’acheteur va le plus souvent :

  • Soit rendre le produit au vendeur contre la remise d’un ticket de dépôt
  • Soit envoyer une lettre de mise en demeure au vendeur, avec demande d’avis de réception

La procédure est obligatoirement gratuite, le vendeur ne peut imposer au consommateur le paiement de frais, même pour payer le renvoi du bien.

Le consommateur doit décider s’il souhaite le remplacement du produit ou sa réparation. Si la différence de prix entre ces deux options est importante, le vendeur peut imposer la solution la moins chère.

Si ces deux options sont impossibles, ne peuvent pas être mises en oeuvre dans un délai d’un mois suivant la transmission de la réclamation ou présentent un inconvénient majeur pour le consommateur, le consommateur peut se faire rembourser intégralement le produit (s’il le rend) ou partiellement (s’il le garde).

Il ne faut pas confondre la garantie légale de conformité avec :

  • la garantie des vices cachés, abordée plus haut
  • une garantie commerciale, qui est une garantie facultative que le vendeur ou le fabricant peut proposer et dont il définit librement le contenu (exemple : “garantie constructeur sur 10 ans”). Cette garantie est définie contractuellement, le vendeur ou fabricant la proposant doit donc vous transmettre un contrat écrit précisant le contenu de la garantie, les modalités de sa mise en œuvre, son prix, sa durée, son étendue territoriale ainsi que le nom et l’adresse du garant. Ce contrat doit également mentionner l’obligation du vendeur de se conformer aux garanties prévues par la loi (la garantie légale de conformité et la garantie des vices cachés) en plus de la garantie commerciale; ainsi que la reproduction complète des articles L. 217-4, L. 217-5, L. 217-12 et L. 217-16 ainsi que l’article 1641 et le premier alinéa de l’article 1648 du code civil.

Pour résumer

Si le vendeur de l’habitat léger n’est pas un professionnel, la seule garantie dont l’acheteur bénéficie est la garantie des vices cachés, sachant que le contrat de vente peut prévoir une clause d’exclusion de cette garantie.

Si le vendeur de l’habitat léger est un professionnel, il est possible de jouer sur plusieurs garanties :

  • les garanties du droit de la construction, seulement si l’habitat léger n’est pas déplaçable
  • la garantie des vices cachés
  • la garantie légale de conformité, seulement si l’habitat léger est déplaçable
  • éventuellement, si ceci est prévu dans le contrat de vente, une garantie commerciale

 

Textes de loi

> Articles L 217-4 à L 217-14 du code de la consommation (garantie légale de conformité)

> Articles L 217-15 à L 217-16-1 du code de la consommation (garantie commerciale)

> Articles L 241-5 et L 241-6 du code de la consommation (sanctions en cas de violation du régime légal de la garantie légale de conformité et de la garantie commerciale)

> Arrêté du 18 décembre 2014 relatif au contenu des conditions générales de vente en matière de garantie légale

Crédit Photos :  S. Hermann & F. RichterSabine van ErppeagreenbeanlanurManfred Antranias Zimmer de Pixabay

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